À la rencontre des beaux arbres de Nîmes

Les chênes méditerranéens : chêne vert et chêne blanc

Texte et photos de Véronique Mure

Les chênes méditerranéens : chêne vert et chêne blanc

Famille : Fagaceae
Genre : Quercus
Espèces principales sur le territoire nîmois :

  • Quercus ilex L. — chêne vert, yeuse
  • Quercus pubescens Willd. — chêne blanc, chêne pubescent
  • Quercus coccifera L. — chêne kermès, arbuste des garrigues sèches

Identification et biologie

Arbres forestiers des zones tempérées et méditerranéennes, les chênes représentent, avec les hêtres et châtaigniers, la grande famille des Fagacées dans l’hexagone.

Chêne vert – Quercus ilex L. (yeuse)

  • Taille moyenne : 8 à 15 mètres.
  • Grands sujets : jusqu’à 20 à 25 mètres dans des conditions favorables (sols profonds, absence de coupe ou de feu).
  • Tronc : souvent court et multiple dans les garrigues, mais il peut atteindre 1 à 1,5 m de diamètre sur vieux individus.
  • Croissance : lente (10 à 20 cm/an en hauteur les premières décennies).
  • Longévité : de 400 à 500 ans, parfois davantage.
  • Particularité : c’est un arbre à feuillage persistant, au houppier dense, arrondi et sombre, résistant à la sécheresse et au feu ; on le trouve principalement sous forme de taillis dans les garrigues du fait de son exploitation millénaire.

Chêne blanc – Quercus pubescens Willd. (chêne pubescent)

  • Taille moyenne : 10 à 20 mètres.
  • Grands sujets : jusqu’à 25 mètres dans des stations profondes et fraîches (fonds de vallon, versants nord).
  • Tronc : droit, jusqu’à 1,5 m de diamètre chez les individus âgés.
  • Croissance : modérée à lente, mais plus rapide que celle du chêne vert dans les sols bien pourvus en eau.
  • Longévité : 400 à 600 ans.
  • Particularité : semi-caduc (feuilles sèches souvent persistantes l’hiver : marcescent), plus clair de feuillage et d’écorce, il forme souvent de beaux arbres isolés dans les paysages agricoles ou les mas.
Les deux espèces cohabitent dans le massif des garrigues nîmoises, formant une mosaïque typique des milieux méditerranéens en compagnie du chêne kermès.
Rien de surprenant à les retrouver dans la ville, sur l’espace public comme dans les propriétés privées. Présents en peuplement dans les grands parcs, tels les Jardins de la Fontaine ou le Mont-Duplan, ou isolés dans les squares comme le square Antonin ou le square de la Couronne (déjà signalés par Gustave Cabanès en 1898), ils établissent un lien avec leurs congénères forestiers.

Symbolique et étymologie

Arbre sacré, reliant la terre au ciel, abritant le feu divin et la foudre, le chêne symbolise la force et la justice.

Son nom grec, drus, signifie littéralement “l’arbre”, d’où vient le terme dryade, nymphe des forêts.
En celte, derw (racine du mot Druide) désigne l’arbre sacré, consacré à la sagesse.
Quant au lien entre l’origine du mot garrigue et le chêne kermès, Paul Marcelin en 1926 ne croit pas bien intéressant d’en discuter. On regarde habituellement ce mot, nous dit-il, comme dérivé du nom indigène (gari) du Quercus coccifera, ou chêne kermès, mais la dérivation n’est pas prouvée. En cela il fait référence au Dictionnaire languedocien-français de Boissier de Sauvages de 1820 dans lequel le kermès, s’appelle, dans les environs de Nîmes, avaou et non gari.

De l’écologie à l’économie, la place des chênes dans l’histoire

Sur les sols calcaires du massif des garrigues nîmoises, la forêt mixte de chêne vert et de chêne blanc représentait un état climacique naturel du couvert végétal. L’anthropisation précoce du territoire (dès le Néolithique) a toutefois modifié cet équilibre :

  • Le chêne blanc, plus exigeant en eau et en sols profonds, a régressé sous la pression agricole.
  • Le chêne vert, l’yeuse, capable de rejeter vigoureusement de souche, a été favorisé par les usages humains : coupes répétées pour le bois de chauffe et le charbonnage, pour le bois de chauffe.


Jusqu’à l’arrivée des énergies fossiles, le chêne vert a constitué un pilier économique du Gard, fournissant du combustible pour les fours (fours à chaux notamment, fagots pour la boulange…), du tanins (écorce) et des glands, consommés par les animaux et parfois par les populations locales.

Quel avenir pour les chênes méditerranéens ?

Le couple chêne vert / chêne blanc représente toujours le socle forestier identitaire du territoire nîmois.
Ils incarnent la résilience des paysages méditerranéens, la mémoire des usages anciens, et la continuité d’un patrimoine naturel et culturel à préserver. Même si, il faut bien s’y résoudre, les changements climatiques en cours mettent à mal ces représentations en constituant une menace pour leur avenir.
Leur présence dans la ville constitue un lien entre histoire, écologie et culture locale.

Patrimoine nîmois et recherche : le Vallon des chênes de Clos Gaillard

Le Clos de Gaillard, vaste massif forestier de 150 ha au nord de Nîmes (propriété communale depuis 1400), a subi plusieurs incendies récents (1984, 1989). Dans son cœur, le Vallon des Chênes abrite, sur un hectare, une collection d’environ 30 espèces de chênes circum-méditerranéens (liste ci-dessous), plantés entre 1995 et 1998 à l’initiative du pédologue-forestier nîmois Pierre Rutten, membre du Groupement de Développement Forestier du Gard, avec le concours de l’ONF et de la ville de Nîmes, afin de tester pour leur adaptabilité aux conditions méditerranéennes.
Cette plantation expérimentale visait à évaluer l’adaptabilité des chênes caducifoliés au sol calcaire et à la sécheresse, dans un contexte de changement climatique. Elle constitue aujourd’hui un patrimoine scientifique vivant, témoin de la recherche locale sur l’avenir des forêts méditerranéennes.

Liste des espèces du Vallon des Chênes :

Q. petra, Q.pinnatiloba, Q.pubescens, Q.petrea, Q.congesta, Q. dalechampii, Q.brachyphylla, Q.pedunculiflora, Q.brutia, Q.libani, Q.ithaburensis, Q.afares, Q.trojana, Q.cerris, Q.mirbeckii, Q.fraginea, Q.infectoria, Q.lobata, Q.kellogii, Q.douglasii, Q.garryana, Q.velutina, Q.macrocarpa, Q.stellata, Q.prinus, Q.muehlenbergii, Q.acutissima, Q.variabilis

Un tel arbre existe Square Antonin.

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